mardi 6 mai 2008

L'urgence d'écoles africaines en occident

Ils sont de plus en plus nombreux, nos frères et sœurs d’Afrique à s’être laissés séduire par l’offre de bien être occidentale.

Pour beaucoup, l’aventure européenne n’est que temporaire : question de se faire de l’argent, de survivre, en attendant que la situation s’arrange chez soi.

Les choses ne se passent malheureusement pas toujours et à raison comme beaucoup l’espérions. Avec le temps, ne reste plus de nos intentions que l’illusion de pouvoir les accomplir. Les allers-retours annuels (épisodiques pour les autres) nous donnant à croire que le retour définitif se présentera un de ces quatre.

Il arrivera aux africains ayant émigré en occident d’avoir à faire des enfants, avec le secret espoir que ceux-ci fassent mieux qu’eux, grandissent dans de meilleures conditions et surtout ne perdent pas pied avec le nécessaire attachement à leur mère patrie : l’Afrique.

Si rien de profond n’est initié dès à présent, beaucoup risque de se rendre compte qu’est pris au leurre qui croyait prendre : que l’aventure occidentale n’était qu’un joli piège pour attirer les meilleurs le temps d’une génération, leurs fils et petits devant avoir à faire face à la dure réalité d’un système qui n’a pas pour vocation de faire d’eux des gens de qualité, qui semble n’avoir pour obsession pour les générations à venir qu'à en faire d’excellents subalternes.

Le système éducatif Français à la réputation d’être discriminant. On nous (Africains) reconnaît l’aptitude à refuser de faire face à la réalité. Ils seront très peu nombreux les fils et petits fils d’immigrés à bénéficier d’un bon enseignement, à garder en eux cette mémoire de la mère patrie que nous entretenons. Ils seront des millions d’africains expatriés destructurés, à être en quête de référence, de sens, de valeur, de repères dans ces contrées où rien ne leur sera facilité.

Nos fils petits fils, si nous ne prenions à bras le corps le problème dès à présent, auront à fréquenter des systèmes où rien ne sera fait pour les libérer de leurs complexes.

Ils risquent pour beaucoup de n’avoir pas la chance que nous avons eu : Celle de savoir d’où nous venons, d’hériter des valeurs, de n’avoir eu durant notre tendre enfance pour seule préoccupation que de retenir et exceller dans nos leçons, les fils et petits fils d’immigrés vivront la douloureuse expérience d’être une minorité stigmatisée dans un espace d’enseignement qui ne vous veut pas du bien, où alternent distanciation et souvent moquerie de la part des éducateurs.

Faire son éducation en France lorsque l’on est fils de migrant n’est pas simple. Très peu s’en sortent. Le destin des fils d’immigrés serait-il de faire la plonge au McDO, de côtoyer les moins bonnes écoles, de subir une histoire, un endoctrinement dont on se sent absent, qui ne vous parle pas, par des gens qui s’en foutent que vous compreniez ou pas ?

Parceque les politiques et multinationales occidentales l’ont comprises, et afin que les leurs ne perdent pas pied avec leurs cultures et racines, des écoles, lycées et collèges sont exportés là où les nécessités de service les amènent à s’expatrier. Assurant de ce fait la garantie que les fils de migrants occidentaux bénéficieront au pire de cette double culture qui fera leur richesse, auront incrusté dans leur imaginaire d’ado l’essentiel de ce qui fait la culture, l’identité, la fierté de leurs parents.

Nous Africains, ne disposons malheureusement pas ici en Europe des structures éducatives propres qui forgent l’identité de nos jeunes frères et sœurs, des centres éducatifs qui soient un rempart à cette politique de sous-qualification, sous-culture, sous-emploi qui leur est proposée.

Il importe que dès à présent nous prenions conscience de l’immense gâchis que sans le savoir nous construisons. Il est important que nous sachions ce que nous voulons pour nous et ceux à qui nous donneront vie. Quelle identité, quelle culture, quel enracinement ? Il importe que nous identifions notre voie et prenions les dispositions appropriées.

L’une des premières initiatives pour ceux qui n’oseraient pour de multiples bonnes raisons offrir un parcours éducatif à leurs enfants dans leurs pays d’origine, c’est de se voir proposer ici en occident une offre éducative puisant dans les racines et valeurs africaines, mêlant fierté, orgueil, profondeur, spiritualité, partage, solidarité, excellence.

Je rêve d’un maillage éducatif africain ici en Europe. Je rêve des écoles, collèges et lycées avec des enseignants fiers de leurs origines africaines, fiers d’avoir à passer de la connaissance et du savoir aux petits anges, fils d’immigrants africains. Je rêve de ces Ecoles, Collèges où entre deux cours, dans leur moment de « détente », les gamins pourront se ressourcer admiratifs auprès de ces portraits imposants tapissant les murs des classes, biblio, cafétéria, gymnases à l’effigie de toutes ces sommités qui font la fierté de l’homme noir - Patrice Lumumba, Martin Luther King, Nelson Mandela, Oprah Winfrey, Stanley O'Neal, Thabo Mbeki, Thomas Sankara, Kwame Krumah, Manu Dibango, Pierre Akendengue, Tchikaya U Tamsi, Mamadou Koulibaly, Alpha Oumar Konaré, Victor Fotso, Denzel Washington, Barack Obama, Cheick Anta Diop, Spike Lee, Helen Johnson Sirleaf, Paul Fokam Kanmogne, Simone Gbagbo, Mongo Beti, Charles Blé Goudé… - et auxquels il serait agréable qu’ils s’y identifient.

Place aux actes.

6 commentaires:

  1. Tu poses là un vrai problème, pour ne pas dire un vrai défi. Le système éducatif français est imparfait et il est urgent qu'il soit réformé en profondeur afin qu'il prenne en compte toutes les composantes de la société française.

    Les initiatives communautaristes ont l'avantage de garantir un socle culturel solide aux minorités mais je reste plus réservé quant à leur capacité à ouvrir l'esprit.

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  2. Bonjour. Bravo pour le blog, je le lis de temps en temps.

    Je suis a moitié d'accord sur ce dernier billet. Car j'ai peur moi aussi des communautarismes.
    D'ailleurs aux US les noirs ne sont toujours pas intégrés. Contrairement au Bresil par exemple, ou le metissage est effectif.

    Le système scolaire français n'est pas si mauvais je crois. Mais un petit blanc fils de paysan n'aura jamais les mêmes chances d'un fils de fonctionnaire c'est comme ça.

    Il faudrait peut etre aussi attaquer les problemes à la source. Que dans les manuels d'histoire du burkina l'histoire de Thomas Sankara tienne en un peu plus que 2 lignes.

    Bref autant je suis d'accord pour que l'homme noir efface ses complexes construits et imposés par le blanc (en gros), autant je crois que la bonne manière de résoudre le problème est dans le metissage plutot que dans l'affrontement (pour lequel je vous sens assez partant, mmh?)

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  3. @DJE
    Ce qui est appréciable est que l'on refuse aux africains de pratiquer en Occident, ce que les occidentaux font avec plus de sévérité en Afrique : Une vie en autarcie.

    Le communautarisme, ça ne sont que des mots, j'y accorde pas grande importance. Ce qui prime pour moi, c'est les faits, les actes, ce que nous voulons pour nos fils et petits fils.

    Il n'y a que les Africains pour ne pas faire le saut du vivre ensemble éducatif. Tous les autres groupes culturels le font sous des dénominations plus soft.

    Des centres éducatifs à vocation Africaine rassure-toi ouvriront un million de fois plus l'esprit aux fils et petits fils d'immigrés que le système de castes éducatifs actuel qui les confine à la culture banlieue pour mieux les exclure plus tard.

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  4. @Wallaye
    Merci pour les mots d'encouragement.

    Le modèle communautariste Américain est plus porteur de valeurs que le modèle assimilateur français. La preuve, les USA sont à deux doigts d'offrir au monde un président black ayant fait Harvard et ayant trouvé sa voie, son identité en pratiquant assidûment ceux de sa communauté.

    Le communautarisme culturel est une réalité. Les gens se retrouvent par affinités. Ca est un fait. Mon billet voudrait juste amener les uns et les autres à prendre conscience de ce qu'il soit important d'offrir une alternative au modèle éducatif vicié qui est proposé aux populations noires en France.

    Suis hélas pas pour l'affrontement, suis pour la défense de la survie des miens, ces pauvres qui n'ont fait de mal à personne et qui souffrent depuis 500 ans de la cupidité, du machiavelisme, du deni d'humanité entretenus par des cercles de nuisance parfois soutenus par des Etats.

    Ma passion c'est de faire en sorte que les miens soient fiers d'eux, s'approprient leur histoire, leur destinée. Ca n'est qu'à cette condition qu'ils se rendont tête haute au carrefour du metissage culturel. On n'y est pas encore.

    Une dernière, le fils du paysan Français a mille fois plus de chance de s'en sortir que le fils du médécin, de l'ingénieur, de l'avocat immigré pourtant mieux fourni intellectuellement et physiquement.

    C'est ça qui est la vérité :)

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  5. Bravo ! J’ai été très touchée par ce que tu dis et je pense avoir une explication à ce phénomène. Peut être à cause de ce complexe d'infériorité - reliquat de la colonisation - qui nous caractérise tant nous les africains face au blanc, le système éducatif français a toujours été considéré comme meilleur que celui de n’importe quel pays d’Afrique. D'ailleurs en Afrique combien de notables préfèrent envoyer leurs enfants à l'école française, plutôt qu’à l’école publique même si les frais de scolarité de celle-ci sont exorbitants? J'ai subit ce destin que tu décris si bien et le résultat est là : aujourd’hui je connais mieux l’histoire et les valeurs de la France que celle de mon propre pays. L’idée de la création d’une école africaine est très pertinente et je nous (africains) y encourage très fortement car les résultats ne peuvent être que valorisants pour notre communauté.

    Cependant cette question soulève un autre problème de fond : combien de diplômes délivrés par nos universités ne sont pas reconnus par la France ? Combien de nos ingénieurs venus en France se sont retrouvés à faire des petits boulot qui n’ont rien à voire avec leur formation initiale et ce pour un salaire de misère? Combien de nos meilleurs médecins occupent aujourd’hui un poste décadent d’infirmier dans les hôpitaux en France ?

    Mais voilà, la plus part préfèrent cette misère qu’est la France plutôt que d’affronter la « honte » de rentrer bredouille au pays. Sauf qu’il n’y a pas de honte à assumer ses erreurs, au contraire. Comme majorité de mes compatriotes j’ai choisi de venir en France parce que je croyais (parce qu’on m’a fait croire) que c’était mieux ici. Je suis venue… et j’ai vu… aujourd’hui je n’ai qu’une chose en tête : rentrer, parce qu’il n’y a rien de mieux que de vivre, voire ses enfants grandir et mourir dans sa terre natale et ce quel qu’en soit le prix

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